mardi 27 septembre 2011

Ayer : le rythme chorégraphié qui adoucit la rue


Il y a toujours une étrangeté à s'approprier la rue pour y faire œuvre d'art. La pièce ci-dessous m'a intrigué quand je l'ai découverte. La musique, me direz-vous, est assez sommaire. Certes. Mais c'est parce qu'Ayer est un groupe de danse percussive. A moins que ça ne soit de musique corporelle ou de rythme chorégraphié. Emmené par Estêvão Marques, Ayer s'est lancé dans un travail de recherches sur les danses populaires du Brésil et dans la confection d'instruments à base de matériaux recyclés. On y trouve les classiques tuyaux en PVC*, les bouteilles plastiques, les cuillères en bois, etc... Leur travail repose sur le jeu entre ce qui se voit et ce qui s'entend, sur la force de la musique en mouvement, la "força da música em movimento".

Sous ses airs juvéniles, Estêvão Marques possède déjà un beau parcours. Conteur, danseur et musicien. Comme musicien, il s'est d'abord adressé au jeune public au sein du groupe Palavra Cantada, ayant joué avec Chico César, Antonio Nóbrega ou les Barbatuques. Il est également professeur de danse et de percussions. 


Voici le titre "India", une respiration dans l'espace urbain, tourné ce mois-ci, le 7 septembre, dans le centre de São Paulo. La mégapole y prend des airs fantômes à être ainsi déserte. Derrière son apparente simplicité, le geste d'Ayer est fort. C'est un geste de rupture que de s'asseoir par terre sur un trottoir, sur une place, dans la rue. La rue est un lieu de passage qui n'est pas destiné à ce qu'on s'y arrête. A son échelle singulière, elle reproduit le mouvement sans trêve de la ville. On sait bien l'obsession des forces de l'ordre à contrôler la moindre manifestation, réduite dans leur pauvre vocabulaire à des troubles sur la voie publique. En s'asseyant par terre et en jouant de ses cuillères en bois, Ayer casse en douceur le flux incessant de la ville pour lui opposer l'entrain ludique de son rythme musical.

Par principe, ce type d'intervention est éphémère. Le calme et la poésie ne durent jamais. On en appréciera d'autant plus cette parenthèse.



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* Ca doit bien faire une trentaine d'années que Uakti les utilise. Mais, pour les avoir vu il y a bien longtemps sur scène, on oublie ce détail pour être emporté par une musique superbe.

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