vendredi 11 novembre 2011

Malka Family (3/4) : Pour le Kif et sur la plage (1991, 20 ans après)


Il y a vingt ans, Malka Family sortait son premier album, On The Beach. Avant cela, il y eut un 33Tours partagé avec Human Spirit et Clark International. Rlack Boots, ça s'appelait. Et c'est déjà Seb, le batteur de Malka, qui en avait dessiné la pochette. Un disque que j'ai fait tourner souvent sur la platine malgré un son pourri, un son de débutants de l'auto-prod' qui font de leur mieux.


Parler d'On The Beach alors que l'hiver approche et que les plaisirs de la plage sont déjà loin pourrait laisser croire à un mauvais décalage, un truc pas dans le bon tempo, sauf que d'un point de vue parisien, la plage est loin toute l'année ! Alors être on the beach en devient presque une attitude, une capacité à s'ensoleiller le quotidien. A kiffer la vie, puisque telle est la mission que s'est fixé Malka Family : "transmettre et partager le kif" !

L'intro du disque plante le décor, un récitant évoque cette mission sur fond d'instrumental épique.

"Sur une petite île vit une tribu d'Humains, les Rlackboots. Tous les membres de cette tribu savent maintenir ce que l'on appelle le kif. Cette magie transmise de père en fils permet à tout le monde de vivre en de bonnes mœurs et bien-être.


Ce savoir ancestral intéresse fort le gros Régor Blops, président du ténébreux empire Krozembourg qui, muni du kif, pourrrait avoir plus d'argent et de pouvoir. Il attaque les armes à la main. Les Rlackboots, ne connaissant rien à la guerre, subissent de sérieux dommages.


Au seuil du trépas, l'ancien envoya son fils Malka avec une dizaine de jeunes rescapés pour transmettre et partager le kif..."

Un scénario qui ne déparerait pas sur un concept album à la Clinton, modèle assumé de Malka. C'est le genre d'albums qu'il faut impérativement avoir en vinyl plutôt qu'en CD. L'illustration au recto du disque, sa "pochette" montre une jeune femme noire allongée sur une plage, elle est réalisée par Woody Braun, saxophoniste du groupe, et et fait office d'invitation à entrer. Car il s'agit d'un de ces albums où la pochette s'ouvre. Ici, c'est pour révéler une vaste fresque qui évoque le monde enchanté des Rlack Boots : plage, soleil, musique, fumette... tandis que, dans le coin en bas à droite, le "ténébreux empire" crache sa pollution et menace d'étendre sa domination agressive. C'est encore Seb qui est à l'œuvre. On retrouve sur cette fresque la même volonté de multiplier les détails, les cases, les phrases en bulles que chez Pedro Bell, l'artiste qui a conçu les pochettes de Funkadelic pour George Clinton. D'où l'impératif du vinyl : sur la pochette d'un CD, il faudrait une loupe pour remarquer toutes ces enluminures. Mais je suis bien embêté car je ne trouve pas l'image de cette pochette intérieure sur la Toile et je serais bien incapable de scanner un aussi grand format. Le seul moyen que j'ai trouvé pour vous plonger dans cet univers visuel, c'est cette vidéo qui explore la pochette dans ses détails.


Alors, avec les potes, on l'a détaillée cette pochette, regardée en large et ne travers pendant qu'on écoutait le disque. Faut-il rappeler qu'aux débuts du phonographe, les gens étaient perturbés de ne pas voir les musiciens. Et que ce n'est rien d'autre que le principe schizophonique de l'enregistrement, à savoir, tout simplement, "la séparation entre un son original et sa reproduction électro-acoustique". Dans son livre Capturing Sound, Mark Katz évoque cet amateur d'opéra qui, en 1929, avait construit les maquettes des décors de ses opéras favoris et qui changeait même de décor pour chaque acte !

Pour revenir à la mission de nos Rlack Boots, il ne faut bien sûr pas se méprendre et voir dans le groupe une bande de dealers parce qu'ils parlent de "transmettre et partager le kif". Il ne faut pas se tromper sur le sens de kif. On connaît le kif pour être la forme sous laquelle les Marocains fument le cannabis quand ce n'est pas du haschisch. Il s'agit des têtes séchées de la plante que l'on mélange avec du tabac. En l'occurence, le kif n'a pas ici ce sens-là, il ne s'agit pas de la substance mais de l'expression populaire : le kif !

Outre cette pochette aux mille détails, le groupe s'était courageusement lancé dans la réalisation d'un clip à base de pâte à modeler ! Une patiente animation en stop motion qui a dû meublé leurs longues soirées d'hiver. Heureusement, ce ne sont que quelques séquences, l'essentiel du clip montrant le groupe jouer en prises de vue réelles. Mise en garde à l'usage des parents : un acte sexuel explicite y est représentée... une bonne branlette en pâte à modeler !



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